Les Questions Dangereuses de Lionel Davoust

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Quatrième de couverture :

1637 : Qui a assassiné le docteur Lacanne, en plein château de Déversailles ? Pour connaître la réponse à cette question, le mancequetaire Thésard de la Meulière, son libram à la main, est prêt à résoudre les énigmes les plus perfides… jusqu’aux confins de l’indicible.

Editeur : ActuSF, Collection Hélios

Nombre de pages : 120

Prix : 4,90€

Date de publication : 3 Janvier 2018

Mon Avis :

Lors de la dernière Soirée littéraire à la Librairie Décitre Grenoble, en octobre dernier, Lionel Davoust avait parlé de la sortie d’une novella Les Questions Dangereuses, en janvier 2019. Il s’agit en réalité d’une seconde édition car elle avait déjà été publiée dans le cadre d’une anthologie De Capes et d’Esprit, aux éditions Rivière Blanche, en 2011. Aujourd’hui, cette seconde publication a été agrémentée d’une interview entre l’auteur et Nicolas Barret et à ce titre, je remercie les éditions ActuSF pour me l’avoir proposé en Service Presse. J’ai déjà lu un roman de Lionel Davoust, Port d’Ames et en octobre, sur les conseils de mon libraire Mathieu, j’avais également pris La route de la conquête que je devrais lire cette année. Et je dois dire que la lecture des Questions Dangereuses a été fort agréable.

En 1637, alors que le mancequetaire Thésard de la Meulière assiste aux funérailles de l’érudit Sigismond Frédéric, au Château de Déversailles, il est le témoin de l’assassinat du médecin de la Reine, Lacanne. Or, le malheureux a été tué d’une manière peu orthodoxe : qui a eu l’impudence de l’occire avec une flêche? Avec son acolyte, Batz d’Arctangente, ils partent immédiatement à la recherche de l’assassin mais font chou blanc. C’est alors que Thésard de la Meulière tombe sur un bien étrange bout de papier écrit en anglais et raturé en français. La nuit après, des cauchemars commencent à peupler ses rêves…

A mon avis, Lionel Davoust a dû beaucoup s’amuser à écrire cette novella et cela se sent à la lecture. Il part dans des considérations délirantes inspirées par le style du surréalisme. En effet, les duels ne se font pas à l’épée mais via les jeux de l’esprit grâce à la présence d’un libram à leur côté, dans lequel les mancequetaires, fins érudits, piochent des énigmes pour attaquer leurs ennemis! Ainsi, à la manière du Sphinx qui interroge Œdipe ou Gollum avec Bilbon, une mauvais réponse pourrait s’avérer fatale.

« Je peux sombrer dans la folie, compter le temps et sombrer en poussière, qui suis-je? » s’écria la Meulière à toute vitesse.
Elle (Fall Leadenweather) n’atteignit jamais son échappatoire. Elle se figea, la main suspendue au-dessus de la poignée, et ses épaules se voutèrent. Elle fit volte-face avec rage.
« Mes rêves, messire. Mes rêves. »
La Meulière resta interdit et bredouilla : « Ce… Faux. C’est : le grain. Ce n’est pas la Réponse que j’attendais.
– Elle est pourtant juste. Voyez mon visage et dites-moi : y lisez-vous une quelconque douleur relative au mensonge ou à l’erreur? » (p. 41)

Et c’est là que l’auteur aura réussi un exploit! Me faire aimer un texte de cette mouvance littéraire! L’écriture est fine, ciselée et fait mouche grâce à un humour omniprésent et percutant : rien que la couverture signée Ammo vous donne une idée du ton.

Ah Batz! Clerc, moine – que dis-je, philosophe! – ce sont là les métiers à haut risque, non le nôtre. (P.8)

Et le récit s’inscrit assurément dans la parodie : le titre, tout d’abord, qui fait évidemment référence au roman de Pierre Choderlos de Laclos, Les Liaisons Dangereuses, dans lequel, les échanges épistolaires peuvent être aussi dangereux que la pointe d’une épée. Quant à la présence des Mancequetaires, il s’agit d’un néologisme qui rappelle les héros du fameux roman d’Alexandre Dumas, Les Trois Mousquetaires. D’ailleurs, le nom de Batz d’Arctangente ne fait-il pas penser à D’artagnan? La parodie ne s’arrête pas là car la présence de François-René, comte de Spline et auteur des Mémoires d’Hécatombe est un clin d’oeil à François-René de Chateaubriand, auteur des Mémoires d’outretombe et représentant du courant littéraire, le romantisme.

François-René de Spline à Thésard de la Meulière :
« Je vous l’ai dit, vos petits jeux mentaux sont sans effet sur moi! gronda le poète. J’ai contemplé les profondeurs de l’abysse, du doute et de la négation. Oui, messire, je me suis posée les Questions taboues, je les ai affrontées de face, je les ai laissées me consumer, m’engloutir, et je suis revenu du néant! J’ai compris que l’existence n’a aucune signification!
– Peuh, monsieur, vous parlez comme un romantique! » (p. 56)

Juste un dernier mot concernant l’interview menée par Nicolas Barret à la fin de l’ouvrage : elle permet non seulement d’apporter quelques éclaircissements sur le texte des Questions Dangereuses, et met également en lumière le processus d’écriture de Lionel Davoust, ses influences et ses goûts littéraires.

En conclusion, je me suis beaucoup amusée à lire Les Questions Dangereuses de Lionel Davoust. La novella très drôle, délirante et bien écrite, s’inscrit dans les registres de la parodie et du surréalisme. Bien que je ne sois pas très fan à l’origine de ce courant littéraire, l’auteur aura eu au moins le mérite de me faire apprécier son texte.

10 commentaires

  1. Je pense que je vais la relire du coup, les citations que tu as mises sont très bien choisies pour donner envie ^^ Et puis je suis curieuse de lire l’entretien avec l’auteur 🙂

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